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Peut-on concevoir la réalisation d’un travail de qualité sans une bonne maitrise de l’interface homme-travail ? Je ne le crois pas. Or pour l’entrepreneur comme pour le manager, son interface de travail n’est autre que la parole. Qu’elle soit destinée à un partenaire, un client, à son équipe, ses collègues, ou à la direction, la parole est partout. Elle est un des supports par lequel une information se transmet. Information dont le but escompté est d’obtenir un effet sur celui qui l’entend. Donc si mon interface de travail est la parole, je me dois de comprendre ce qu’elle est, comment s’en servir pour bien parler et ce qu’elle permet. C’est ce que je me propose de faire dans cet article.
Note : Cet article est rédigé par Pierre-Favre, animateur du blog apprendreaconvaincre.com et formateur professionnel depuis 2011.
La parole est liée à la pensée
La parole modèle les hommes
Je commencerai en citant Bourdieu :
« Le discours juridique est une parole créatrice qui fait exister ce qu’elle énonce ».
Je souhaiterai aller plus loin. Mon opinion est que la parole. Si elle est suffisamment percutante et répétée, fait devenir l’autre ce que l’on imagine qu’il est. Je m’explique. Dans la mesure où l’être humain intériorise et fait sienne les qualités qui lui sont attribuées ; il va se comporter tel que nous lui laissons à penser que nous le voyons. Encore plus clair ? En ne manifestant ni respect ni politesse envers les professions du « bas de l’échelle » (femme de ménage, ouvrier du btp,…) tu méprises leur dignité ; et leur empêches l’accession à l’état de personnes respectables.
Notre enfance nous a conduits à être ce que nous sommes, en partie par les paroles qui nous ont valorisées et dévalorisées. Et ce phénomène se poursuit dans l’âge adulte, par le regard que portent sur nous les personnes que nous aimons. L’exemple frappant (et il n’y a pas de jeu de mots) est lorsque dans un couple, un des deux conjoints bat ou humilie quotidiennement son partenaire ; jusqu’à le détruire de l’intérieur. Situation qui atteint son paroxysme lorsque celui qui est battu, vient de lui-même à considérer que sa situation est juste.
Ces situations se transposent dans le monde professionnel lorsque la parole bienveillante est la norme, aux antipodes d’une parole agressive qui produira rejet, ressentiment et agressivité. L’autre est le miroir de ce que vous êtes. Soyez chaleureux, amical et bienveillant et l’autre se comportera de même. Soyez condescendant et tyrannique et l’autre vous le rendra bien.
En tant qu’entrepreneur ou manager, être au clair mentalement, sur l’objectif de la relation ; aidera à bien choisir son mode d’expression pour parvenir à ses fins. L’interface qu’est la parole est un moyen, au service d’une fin.
Parler pour quoi faire ?
La parole c’est le support de base de tout ce qui a été fait par l’homme. Avant de devenir réel, chacun des objets qui nous entoure, chacun des concepts que nous utilisons quotidiennement ont été une idée qu’il a fallu définir et affiner. Sachant que la confrontation d’idées conduit à l’amélioration ; et que les bonnes idées ne peuvent être bonnes que si elles ont été confrontées au réel. Il a fallu extraire l’idée de son propre cerveau pour la transmettre à autrui. L’usage de la parole est l’élément, quasi indispensable, pour cette étape.
Il est d’ailleurs presque certain, quel que soit ton domaine d’expertise, que tu utilises un vocabulaire propre à ta spécialité. Car un langage contenant des ambigüités mènera nécessairement à un résultat en décalage avec la demande initiale et le but attendu. Il en est de même dans les relations interpersonnelles. La difficulté sur ce point est de connaitre l’interprétation que fera ton interlocuteur des mots, des expressions, des attitudes et du ton de voix que tu utilises.
C’est donc l’efficacité de tes paroles qui viendront lier ou délier les schémas de pensées de ton interlocuteur. Pour convaincre ou motiver, la mafia utilise les armes, la compromission ou l’argent. À moins d’en faire partie il te reste, l’argent selon les cas (le talent se paye), mais surtout la parole.
Pour terminer ce court chapitre je laisse la parole à Descartes (René pour les intimes) :
« Ceux qui digèrent le mieux leurs pensées afin de les rendre claires et intelligibles peuvent toujours le mieux persuader de ce qu’ils proposent ».
La parole pour exprimer tes idées et tes produits
La parole c’est ce qui nous arrache du monde matériel pour exprimer notre conscience et ; par là même, rencontrer le monde, rencontrer les autres, rencontrer le monde des autres.
C’est la parole qui te permet de manifester ton existence. Et, par extension, l’existence de tes produits ou du projet dont tu es le porteur. C’est cette même parole qui te permet de rendre évident au regard des autres la pertinence de ces mêmes produits et projets. Tu peux avoir la meilleure idée du monde, si l’interlocuteur n’est pas en mesure de la comprendre avec la même précision que toi, tu risques de passer à côté.
Nous sommes tous en quête de simplicité et d’optimisation, seulement, en ce qui concerne la parole, ce sont sa richesse et sa subtilité qui permettent la réalisation de ce qui est complexe. Je citerai ici Bertrand Périer :
« L’affadissement du langage va de pair avec l’appauvrissement des idées ».
Un entrepreneur ou un manager ne peuvent faire l’économie d’un langage adapté à la personne et au contexte.
La parole est liée au projet
Parler, c’est s’exposer
La manière dont tu t’exprimes évoque directement chez ton interlocuteur certaines opinions, certains préjugés. Pour bon nombre, ils seront exacts. Le champ lexical d’un CoDir n’est pas celui d’une start-up, qui n’est pas non plus celui des ouvriers d’une chaine de production. Utiliser l’un à la place de l’autre génère au mieux des incompréhensions, au pire un rejet du locuteur.
La manière dont tu parles c’est aussi révéler ta personnalité, c’est inspirer de la confiance ou de la méfiance. L’attitude que tu adoptes comprend : le ton de ta voix et la posture de ton corps. Ces éléments permettent à celui qui t’écoute et t’observe de comprendre si tu es à l’aise ou non ; confiant ou non, crédible ou non. Quantité de paramètres viennent conforter ou infirmer l’avis qu’il se fait de toi ; au rang duquel il y a le débit de parole et les mimiques que tu utilises. Ce sont d’ailleurs parfois tous ces éléments paraverbaux qui permettent aux (apprentis)-psychologues et (apprentis)-mentalistes de connaitre la véracité de ton propos.
Ce qui est réconfortant, c’est que maitriser la parole est une compétence qui se travaille. Il est fréquent d’observer une corrélation entre réussite sociale et facilité de parole. Alors à défaut d’avoir déjà réussi socialement pour améliorer ton niveau de langage, tu peux améliorer ton niveau de langage pour être considéré par tes supérieurs, subordonnés ou partenaires comme étant quelqu’un d’important au développement de l’entreprise. Et de même que ce qui nous fait hésiter, c’est l’idée que l’on se fait d’une difficulté. Et ce qui convainc les autres de te suivre, c’est l’idée qu’ils se font de ta compétence.
Même si parler peut faire peur, pour les raisons évoquées précédemment ; il faut garder en tête que si ce dont tu parles a du sens pour toi. Tu vas naturellement incarner tes propos et donc augmenter leur impact. L’expression par la parole, c’est juste rendre visible ce que tu es ou ce que tu sais. Alors effectivement, une estime de soi développée va être d’un grand secours. Mais pour l’avoir, il faut que tu saches que ce que tu sais a de la valeur pour les autres. Et, exposer tes connaissances aux autres te permet de le savoir. C’est d’ailleurs pour cela que dès que tu as un projet, il est bien d’en parler pour anticiper les difficultés ; et apporter les correctifs nécessaires à son amélioration.
Parler, c’est conduire les autres
Il me semble que le premier point sur lequel il faut être au clair lorsque l’on parle c’est : pour qui parle-t-on ?
Même une parole qui se veut enseignante peut être destinée à soi-même, que ce soit pour avoir l’impression d’être quelqu’un de profond ou pour s’aider à réfléchir.
Lorsque l’on s’adresse à l’autre : lui impose-t-on notre parole ou attend-on de lui réflexion ou réponse ? Peut-être que le simple fait d’avoir parlé nous satisfait, alors que dans d’autres cas nous avons besoin d’avoir été compris. Deux exemples. Tu as déjà eu plein de commentaires de « haters », s’ils ne t’atteignent presque plus, le simple fait d’en parler peut te suffire. Si par contre, ils te blessent profondément, tu as sans doute besoin d’être compris dans ta douleur, et peut-être même as-tu besoin d’une réponse. La situation est la même, mais ta perception de cette situation est différente et donc tes besoins sont différents.
Il en va de même pour les membres de ton équipe, lorsqu’ils te font remonter une information, lorsqu’ils se plaignent ou critiquent ; est-ce pour l’avoir dit, pour vider leur sac ou attendent-ils une réponse ? Je connais un manager qui s’est un jour fait pourrir au téléphone par un membre de son équipe. À la fin de la conversation un collègue du manager, qui avait entendu les propos tenus par le technicien, demande au manager pourquoi il se laisse crier dessus et manquer de respect sans réagir ?
Ce à quoi le manager lui répond : « Mets-toi à sa place, avec tous les problèmes qu’il a eus sur le chantier il a passé une journée de merde, qui se cumule à un long déplacement. Il avait besoin de se défouler, j’ai servi de punching-ball, moyennant quoi il va bien finir sa journée et demain il va retourner au boulot détendu. J’ai fait mon taf. »
Toujours dans l’option où l’on s’adresse à autrui, est-ce pour lui apporter quelque chose, est-ce pour avoir un retour sur ce que je lui dis ou est-ce pour le convaincre ?
À chaque situation, sa manière d’être et de s’exprimer.
Petite anecdote. Un de mes amis me dit un jour : « Tu apprends aux gens à convaincre, mais moi tu ne m’as jamais convaincu ». Lui qui pensait me provoquer, parce qu’il aime débattre, a été déçu quand je l’ai remercié du compliment. Je veux garder mes amis comme ils sont, j’ai parfois du mal à ne pas chercher à modifier leurs perceptions des choses alors m’entendre dire que j’y arrive m’a semblé flatteur.
Parler, c’est respecter les autres…
Lors d’une discussion ou d’une élocution nous consacrons notre parole à l’auditoire. Lui laisser un espace pour répondre me parait essentiel. Et ce, pour plusieurs raisons, le respect de l’autre, la valeur de sa parole, connaitre ses arguments, …
La parole induit une relation, et une relation induit la parole. Tel un échange de bon procédé, celui qui parle attend de l’autre une réponse, et vice versa. Le commun des mortels imagine une discussion comme un échange à peu près équitable de temps de parole entre les différents interlocuteurs. Or selon le temps que tu mets à disposition de l’autre pour s’exprimer ; et les mots que tu choisis pour orienter son discours, tu atteindras des buts différents.
Je fais partie de ceux qui pensent qu’il est bien plus intéressant et efficace de faire beaucoup parler et parler peu pour obtenir de l’autre le comportement souhaité. La raison principale est la suivante : Si un être humain entend des paroles auxquels il suppose devoir répondre ; il prépare sa réponse au lieu de t’écouter attentivement.
Un être humain a un besoin viscéral d’être compris ; donc ne pas avoir exprimé son ressenti l’entraine à penser à lui et à « l’injustice » qu’il subit. Laisser l’autre parler en acquiesçant ou en manifestant notre attention par des gestes bienveillants, le pousse à vider son sac ; à épuiser ses arguments, à apaiser sa colère. Ne pas répondre et faire peser le lourd poids du silence permet de vérifier si l’autre est enfin disponible à entendre tes paroles. Et comme par magie, s’il s’est senti écouté, entendu et autant que possible compris, son esprit est disponible pour comprendre la teneur de ton message.
Alors, si j’ai un conseil à te donner, laisse dire ton collaborateur jusqu’au bout, sans l’interrompre, et une fois son monologue terminé, tu auras tout loisir d’apporter les éléments utiles à sa compréhension.
… ou pas
Nous sommes tous humains, et il nous arrive de vouloir nous défouler. La parole peut être un défouloir. Attention toutefois, à la violence qu’elle engendre sur autrui. La violence verbale laisse des cicatrices invisibles de l’extérieur mais bien présentes au-dedans de sa victime.
Pour communiquer nous avons besoin d’une interface, pour nous battre nous avons besoin d’une arme. La parole peut être l’un ou l’autre. Je repense au procès d’Abdelkader Merah, lui n’a jamais utilisé que des mots, son petit frère des armes. Ce sont bien les mots qui ont scellé le destin de 4 adultes et 3 enfants.
N’oublions pas cependant que se battre et débattre sont des mots différents. Et bien des conflits s’apaisent parce que les invectives et les propos rudimentaires sortent du débat. La violence physique survient suite à la violence verbale ; qui elle-même n’a pas lieu d’être si l’on a su exprimer une pensée précise pour rendre compréhensible à l’autre le fond de notre pensé.
Une grande force du manager et de l’entrepreneur, est de ne pas se laisser entrainer par ses passions ; et de s’exprimer de manière positive et bienveillante alors que tout dans la situation le pousse à invectiver et rendre les coups. Faire preuve de magnanimité c’est aussi parvenir à extraire le fond d’une parole blessante et provocante pour pouvoir aller plus vite, plus haut, plus loin…
A bientôt
Pierre-Favre Bocquet de apprendreaconvaincre.com
Crédits Photos : Mimi Thian sur Unsplash, kabaldesch0, Eric Ward sur Unsplash,