Toute transition réussie repose sur une adaptation progressive, permettant d’intégrer les changements sans provoquer de rupture brutale.
Une fois votre mission de vie définie et des objectifs ou projets identifiés sur cette base, il se peut que vous deviez vous engager dans une direction totalement nouvelle.
Peut-être avez-vous évolué sur votre trajectoire actuelle depuis des années, et voilà que vous venez de déterminer une vision radicalement différente.
Il est possible que presque tous les pans de votre vie doivent changer — votre hygiène de vie, vos relations sociales, votre travail ou votre carrière, et même vos pratiques spirituelles.
Dans ce contexte, une transition réussie nécessite de coordonner ces multiples dimensions avec prudence.
Ayant moi-même vécu ce type de transition à plusieurs reprises (souvent de manière intentionnelle), je souhaite partager avec vous quelques conseils susceptibles de vous y aider.
Changer de vitesse
Chaque tournant s’accompagne d’une perte de clarté.
Lorsque vous changez de direction, la première chose à anticiper est un profond sentiment d’incertitude.
Imaginez que vous conduisiez en ville : tant que vous suivez une route droite, votre champ de vision s’étend sur plusieurs pâtés de maisons.
Mais dès que vous amorcez un virage, votre perspective se restreint brusquement à quelques mètres.
Vous ignorez ce qui vous attend après le virage.
Pourtant, une fois la manœuvre achevée, votre horizon s’éclaircit de nouveau.
Il en est de même pour ce qui est de votre vie. Lorsque vous changez de cap, votre avenir devient flou et incertain.
Mais cette incertitude n’est que temporaire : une fois la transition bien engagée, la clarté d’esprit revient naturellement.
Une transition réussie suppose d’accepter temporairement une visibilité réduite.
J’en ai fait l’expérience lorsque je suis passé de l’édition de logiciels à une activité d’écrivain et de conférencier à plein temps.
Avant de m’y consacrer totalement, je n’avais qu’une vision floue de ce que cela impliquerait.
Malgré toute ma préparation, trop d’éléments restaient incertains. J’évoluais en terrain inconnu.
Durant la transition, il m’était impossible de planifier à long terme : chaque semaine, de nouvelles découvertes venaient remettre en question mes plans.
Je devais avancer au jour le jour.
Mais après quelques mois, les choses se sont clarifiées, et j’ai pu recommencer à me fixer des objectifs à long terme avec assurance.
C’est précisément dans ce retour de clarté qu’on reconnaît la signature d’une transition réussie.
Prendre son temps
Lorsque vous effectuez une transition importante dans votre vie, prenez votre temps.
Ne cherchez pas à bouleverser tous les aspects de votre vie en un mois.
Trop de changements simultanés peuvent générer un stress inutile.
Il est plus sage de stabiliser certains domaines pendant que d’autres évoluent.
Comme en voiture, aborder un virage trop vite peut vous faire déraper.
Même en ralentissant, vous ressentirez une force latérale.
L’essentiel est de garder le contrôle du volant.
Une fois le virage passé, l’élan vous portera naturellement dans votre nouvelle direction.
Cette progressivité contribue à chaque transition réussie, en évitant les chocs inutiles.
Dans un intervalle de deux ans, mon ex-femme et moi avions accueilli notre deuxième enfant, déménagé de Los Angeles à Las Vegas avec nos entreprises, changé d’État, et acheté une maison en début d’année.
J’avais également entamé une nouvelle carrière et vu mon cercle social se transformer complètement : la plupart des personnes que je fréquentais en rédigeant cet article, je ne les connaissais pas deux ans plus tôt.
Parallèlement, j’avais entrepris un profond travail de développement personnel, modifiant durablement certaines de mes habitudes.
Ces changements étaient nombreux et conséquents. Si nous avions essayé de tout gérer en même temps, nous aurions été submergés.
Mais en les répartissant sur plusieurs mois, nous avons pu les absorber plus sereinement.
Après la naissance de notre fils et pendant notre installation à Vegas, nous avons choisi de stabiliser nos carrières et nos revenus.
Ensuite, nous avons pris le temps de nous acclimater à notre nouvel environnement : trouver une école maternelle pour notre fille, explorer la ville, créer de nouveaux repères.
Une fois cette routine en place, j’ai commencé à développer de nouvelles compétences et à tisser un réseau local.
Quelques mois plus tard, j’ai plongé à plein temps dans mon nouveau métier.
Pendant cette transition, mon ex-femme a maintenu la stabilité de son emploi et de ses revenus, ce qui nous a permis d’avancer plus sereinement.
Chacune de ces étapes, gérée méthodiquement, témoignait d’une transition réussie malgré la multiplicité des facteurs impliqués.
J’anticipais alors, à l’époque, que les douze prochains mois, mon activité et mes revenus continueraient probablement de se transformer.
Pour équilibrer cette évolution, j’ai veillé à maintenir d’autres aspects de ma vie relativement stables.
De manière générale, je m’efforce toujours d’explorer de nouveaux défis dans au moins un domaine de ma vie, mais jamais dans tous en même temps.
Plus j’adopte cette approche, plus je développe ma capacité à gérer plusieurs transitions simultanément.
Adapter votre environnement pour faciliter la transition
L’un des moyens les plus simples pour amorcer un changement est d’adapter votre environnement afin qu’il soutienne vos nouveaux objectifs.
En général, notre cadre matériel reflète la personne que nous sommes à un instant donné.
Si vous aspirez à une nouvelle identité, commencez par transformer votre espace de vie et de travail en conséquence.
Cette étape peut sembler anodine, mais elle est souvent décisive pour garantir une transition réussie.
Par exemple, dès que j’ai pris la décision d’abandonner le développement de logiciels pour me consacrer à la prise de parole en public et à l’écriture, j’ai complètement réaménagé mon bureau.
Je me suis posé la question : « À quoi ressemblerait l’espace de travail d’un conférencier et écrivain professionnel, et en quoi différerait-il de celui d’un développeur ? »
J’ai listé les changements nécessaires et les ai appliqués immédiatement.
J’ai rangé tous mes livres sur la programmation de jeux, mis de côté les distinctions obtenues dans le cadre du développement de partagiciels et mes anciens jeux, puis réorganisé mes dossiers en créant un espace dédié à mes futurs discours.
J’ai aussi libéré mes étagères pour accueillir de nouvelles lectures liées à mon nouveau domaine.
C’était un an avant la rédaction du présent article.
Cet espace s’est désormais entièrement métamorphosé.
Mes classeurs sont remplis de notes de conférences et de documents de référence, mes étagères regorgent d’ouvrages sur l’art oratoire, l’écriture et le développement personnel.
Une étagère entière est désormais dédiée aux trophées et médailles obtenus lors de concours d’éloquence.
Chaque fois que j’entre dans mon bureau, cet environnement renforce mon identité de conférencier et d’auteur.
Le simple fait de contempler cet espace conforte la continuité de ma transition réussie.
Gérer la résistance sociale
Au-delà de l’environnement matériel, il faut aussi composer avec les réactions de votre entourage.
Beaucoup de lecteurs me disent que l’un des plus grands obstacles au changement vient de la résistance sociale.
Ils élaborent un plan pour transformer leur vie, mais se heurtent aux doutes et aux objections de leurs proches.
Apprendre à gérer ces pressions est crucial pour effectuer une transition réussie.
Dans ces moments-là, il est essentiel d’accorder plus de valeur à votre propre jugement qu’aux opinions extérieures.
Même si vous commettez des erreurs en cours de route, elles vous en révéleront davantage sur vous-même et vous aideront à prendre de meilleures décisions à l’avenir.
Le changement fait peur à beaucoup de gens, et votre évolution positive peut être perçue comme une menace.
Posez-vous la question : lesquels de vos amis accepteront la nouvelle version de vous-même une fois la transition achevée ?
Seront-ils toujours là ?
Les amitiés solides survivront à ce changement, tandis que d’autres, plus superficielles, s’effriteront.
Une transition réussie peut donc impliquer de faire le tri dans vos relations, même si cela n’est pas toujours facile.
Toutes vos relations sont concernées.
Certaines ne survivront pas à votre transformation.
Mais si évoluer pour le mieux suffit à briser une relation, cela signifie probablement que cette relation était basée sur quelque chose de temporaire.
Il est plus sage d’opérer le changement et de voir si la relation tient, plutôt que de sacrifier sa propre évolution.
Une relation saine devrait favoriser votre progrès, non l’entraver. Et si certaines doivent se terminer, ce n’est pas une tragédie.
Des millions de personnes font face à des ruptures chaque jour… et finissent par en parler avec recul.
Dans l’optique d’une transition réussie, l’important est de rester fidèle à soi-même, quitte à perdre en chemin ceux qui refusaient votre épanouissement.
Lorsque j’ai quitté le monde du développement de jeux vidéo pour me consacrer au développement personnel, j’ai vu bon nombre de relations superficielles disparaître.
Il n’est un secret pour personne que dans l’industrie du jeu, le développement personnel est souvent regardé avec condescendance — bien que beaucoup passent des heures à perfectionner leurs compétences techniques, ce qui, ironiquement, relève aussi du développement personnel.
Certains ont perçu mon changement de voie comme une attaque personnelle.
Cela ne m’a pas surpris ni freiné, car j’avais déjà vécu une situation similaire en entrant dans l’industrie du jeu.
Dès que vous opérez un changement majeur dans votre vie, attendez-vous à rencontrer une certaine résistance sociale, peu importe la nature de ce changement.
C’est une réaction normale, et il ne faut pas l’interpréter comme un signe que vous faites fausse route.
Vérifiez rationnellement que vous êtes aligné avec vos convictions et continuez.
Quelle que soit votre décision, certains seront convaincus que vous commettez une erreur monumentale.
Laissez-les s’en offusquer et poursuivez votre chemin.
Ne le prenez pas personnellement et, surtout, ne gaspillez pas votre énergie à essayer de les convaincre.
Agissez, et laissez-les s’adapter… ou non. Maintenir le cap, même sous pression, est un élément clé de toute transition réussie.
Le meilleur moyen de gérer cette résistance sociale est de la contrebalancer avec un soutien social plus positif.
Entourez-vous d’un nouveau cercle qui vous encourage et reflète la personne que vous souhaitez devenir.
Idéalement, faites cela avant même de prendre vos distances avec les personnes qui ne comprennent pas votre évolution.
Passez progressivement plus de temps avec ce nouveau réseau, et moins avec l’ancien.
Naturellement, vous vous rapprocherez de ceux qui vous inspirent et vous éloignerez de ceux qui freinent votre progression.
La constitution d’une équipe de soutien bienveillante facilite grandement votre transition réussie, car vous ne vous sentez plus isolé.
Dans mon cas, cela s’est concrétisé par mon adhésion à Toastmasters, une organisation axée sur la communication, le développement personnel et le leadership.
En l’espace de quelques mois, j’y ai tissé un nouveau réseau, tandis que mon ancien cercle s’étiolait naturellement.
Seules quelques amitiés ont résisté au changement, celles où l’essence du lien reposait davantage sur la personne que j’étais que sur mon métier ou mon statut.
À mes yeux, les amitiés les plus solides sont celles qui traversent le temps et les évolutions, indépendamment des changements professionnels ou matériels.
Pouvoir compter sur ce « noyau dur » relationnel est un atout majeur dans toute transition réussie.
(Pour les amateurs de Star Trek : Deep Space Nine, si vous étiez ami avec Curzon Dax, pourriez-vous rester proche de Jadzia ou Ezri ? Tout dépend de ce qui définissait réellement votre relation.)
Lorsque vous entreprenez consciemment une transition majeure dans votre vie, faites preuve de patience envers vous-même.
Lorsque vous rencontrez des résistances matérielles ou sociales, cherchez à les atténuer progressivement.
Il est normal de perdre en clarté d’esprit en plein changement, mais cette clarté reviendra une fois que vous aurez trouvé votre nouvel équilibre.
Les transitions demandent des efforts, mais les bénéfices qu’on en tire à long terme surpassent largement les inconforts du moment.
Article original écrit par Steve Pavlina.
